Transibériades de Klavdij Sluban / by herwannperrin



Les photographies de Klavdijl Sluban font partie d'un parcours dans les contrées traversées par le transsibérien, des contrées dont nous n'aurons qu'une vision partielle en noir et blanc, gorgée d'un noir mat et épaissis qui nous emporte parfois avec lui et parfois nous laisse une sensation d'incomplétude.

 


La première photo m'a immanquablement fait penser à un Bruegel l'ancien contemporain, eh oui cela peut paraître bizarre mais regardez ?y bien et vous verrez les ressemblances avec le peintre du XVIème siècle.

 

Donc un  côté très sombre, très dépouillé aussi, à la limite du visible pour certaines, un monde presque inaccessible aux mortels, il faut se plonger corps et âmes dans cet univers pour en retirer la substantifique moelle : vouloir suivre ses traces et découvrir aussi ces vies, ces mondes qui se transforment continuellement et dont les symboles d'antan, les figures petit à petit s'éloigne de nous à jamais pour entrer dans une nuit sombre .

 

Aussi même si n'apprécierez pas toutes ces ?uvres allez vois cette exposition qui révèlent quelques superbes visions

 

"Klavdij Sluban se déplace à pied à travers les villes d'un Far Est abandonné, où sont passés les habitants ? Il en reste quelques-uns, emmitonnés dans le brouillard, quelques bêtes en fuite ou le dos au mur. À la recherche d'êtres humains, le photographe insiste au-delà de l'Europe, il pénètre en Asie, Russie, Mongolie, Chine, avec le transsibérien, mais il ne rencontre aucune densité humaine. Partout, la géographie prédomine et rend l'espèce humaine négligeable.
Le photographe a la nostalgie de la neige maternelle de l'enfance qui le rebordait dans son coin de terre, mais ici la neige est devenue une lèpre blanche, elle ne recouvre pas le sol, elle le ronge. Son silence est oppressant. Le photographe utilise rarement une vitesse d'exposition rapide pour fixer une course, un mouvement. Il laisse plus souvent un temps de pause plus long sur le diaphragme fermé, pour que le silence imprègne la pellicule. L'immobile a besoin de plus de temps pour affleurer. L'immobile est l'état de grâce du moment messianique, non pas l'exaltation d'un avent, mais une fin de course. Une des dernières photographies revient à un portrait de notre temps, le visage d'une femme aux lèvres entrouvertes pour un baiser au néant, inversé dans un reflet. Elle s'adresse à un point qui la sépare irrémédiablement. C'est tout l'Est qui regarde ainsi vers l'occident. C'est le regard le plus muet de toute la série, il offre et réclame un salut et fait le silence en qui regarde". 


Extrait de la préface de Erri de Luca pour le livre Transsibériades, Editions Actes Sud



Galerie Taiss

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