FIN DE PARTIE de samuel Beckett au théâtre de l'Atelier / by herwannperrin



Ne connaissant pas le texte de Becket, je ne savais à quoi m'attendre. Et voilà que se pose à moi non pas un dilemme, enfin plutôt un point de vue différencié vais-je dire. En fait, il y a trois temps dans cette pièce.

Le premier temps est la remarquable interprétation de Dominique Pinon (Hamm) qui avec Charles Berling (Clov) mène de front et d'une main de maître un texte d'une difficulté extrême. La mise en scène est assez épurée mais correspond bien à l'univers dont il est question ici, une fin de règne, de monde, allez savoir 

Le second temps est le génie que l'on doit reconnaître à Becket qui nous sert là un texte on ne peut plus sublime

Le troisième temps, malheureusement est le fait que cette pièce est très chiante, c'est inexorable et évident mais le texte s'il peut se suffire à lui-même n'en est pas moins difficile à mettre en scène et plus encore à jouer et surtout à apprécier par les spectateurs que nous sommes. 

En effet, au début on se demande ce que l'on peut faire là, c'est étrange ce ton qu'il prend, ces intonations, ces personnages tout droit sortie d'une poubelle, ce roi perdu aveugle qui vit avec son pion, son esclave dans un monde terminée, anéantie, où l'apocalypse a sonné; les derniers survivants en quelque sorte. j'aime bien ce que dis Wikipedia sur les différences de traduction entre le titre français et anglais: "Le titre français et plus encore le titre que l'auteur a donné à sa traduction anglaise (Endgame) peuvent faire référence au jeu d'échec, dont Beckett était d'ailleurs adepte. Hamm serait un roi condamné incapable de reconnaître sa défaite et Clov, son pion, le promènerait de temps à autre sur l'échiquier pour lui donner l'impression qu'il peut encore faire quelque chose". 
Étrange rapport qui se nouent entre ce fils et ses parents ou du moins ce qu'il en reste. 
Pièce d'une violence verbale et presque monologue d'un Homme, d'un seul face à la fin, à sa vie qui se termine, qu'il se raconte... On est dans un univers parallèle et on pourrait se dire que l'on est pas là, que les personnages qui jouent n'existent pas mais font partie d'un rêve ou d'un cauchemar car on n'arrive pas à savoir où est-ce qu'ils vont vers quelles directions ils nous emmènent, peut être aucune au final allez savoir... Étrange et loufoque pourrais-je dire tellement on est partagé entre plusieurs sentiments mais si la première heure peut paraître étrange, amusante, on se lasse de ce texte qui ne va nulle part et on guette une fin tant attendue...

Extrait d'un entretien avec Charles Berling à propos de la mise en scène

"Pourquoi avoir choisi Beckett et plus précisément Fin de partie ?

Beckett me passionne. Il a un regard de poète absolu, une incroyable lucidité sur la condition humaine, la violence qui régit les rapports humains. Et puis, c'est un auteur qui a réussi à briser et reformuler tous les codes du théâtre. Quand on lit ses textes de théâtre on est dans une écriture inattendue, singulière. Beckett est dans le langage du corps. La pantomime n'est pas loin. Le clownesque également. Ce sont ces dimensions qui me bouleversent, m'émeuvent et me font rire.
Fin de partie est une pièce que je trouve parfaite, elle associe si bien la violence absolue, la tragédie humaine à la fantaisie, au rire, au loufoque. J'ai le sentiment que ni l'auteur, ni les personnages ne se prennent au sérieux, il y a une forme de distance par rapport au drame de la vie que je trouve absolument réjouissante. Ce n'est pas pour rien qu'on parle de ce regard d'aigle de Beckett. Il sait qu'à la base de toute relation humaine, il y a un rapport de force, un dominant et un dominé. C'est ce que raconte Fin de partie mais à la manière des clowns, c'est à dire avec de l'outrance".


Nota : Importance des didascalies : Une didascalie est une phrase en italique située dans le texte d'une pièce de théâtre ou le scénario d'un film, une indication de jeu ou de mise en scène rédigée par l'auteur à destination des acteurs ou du metteur en scène. Elle permet de donner des informations par exemple sur la tenue vestimentaire, une action physique ou parfois l'humeur du personnage.

1 place Charles Dullin 75018 Paris ? métro Anvers ou Abbesses
Tel : 01 46 06 49 24