L'étranger d'Albert Camus / by herwannperrin


Relecture après une lecture initiale datant d'il y a 16 ans, le temps passe... et voilà qu'aujourd'hui encore je tombe sous le charme et m'interroge à la lecture de ces lignes. Il y a beaucoup dans cette oeuvre qu'il faut digérer tranquillement à sa manière; y revenir et faire sien les idées, les concepts qui naviguent ici.

Sans faire trop de discours, je crois que ce qui finalement résume le mieux l'Etranger est un poème de Charles Baudelaire initialement dans Le Spleen de Paris et repris en 1864 sous le titre Petits poèmes en prose :

L'étranger

"Qui aimes-tu le mieux, homme énigmatique, dis? ton père, ta mère, ta soeur ou ton frère?
   - Je n'ai ni père, ni mère, ni soeur, ni frère.
   - Tes amis?
   - Vous vous servez là d'une parole dont le sens m'est resté jusqu'à ce jour inconnu.
   - Ta patrie?
   - J'ignore sous quelle latitude elle est située.
   - La beauté?
   - Je l'aimerais volontiers, déesse et immortelle.
   - L'or?
   - Je le hais comme vous haïssez Dieu.
   - Eh! qu'aimes-tu donc, extraordinaire étranger?
   - J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas... là-bas... les merveilleux nuages!"

Il a été chanté par Ferré évidemment.



A l'époque, en 1991, c'est-à-dire il y a maintenant une éternité, et même si cela est succinct et date un peu maintenant, voilà ce que j'avais écrit: "Camus donne, avecl'Etranger, une " expression mythique" de la sensibilité moderne. Meursault est une incarnation de l'homme absurde. L'homme  absurde est bien sûr , l'expression d'un temps de désarroi. L'Etranger a été conçu et écrit à la veille de malheurs collectifs, et il a trouvé sous l'occupation, lors de sa publication, des échos particulièrement favorables. le héros de camus n'incarne pas seulement la sensibilité d'un temps, il est aussi un double de l'auteur. camus a souligné, à plusieurs reprises, la conscience qu'il avait d'un identité commune avecMeursault. Il notait en mars 1940, dans ses carnets, deux mois avant d'achever l'Etranger : " Tout m'est étranger (...) Que fais-je ici, à quoi riment ces gestes, ces sourires ? Je ne suis pas d'ici, ni 'ailleurs non plus (...)".

En retrouvant une vieille coupure de journaux du 9 mars 1987, on peut lire dans le supplément littéraire du Figaro de l'époque : "N'est-ce pas Emmanuel Roblès qui, évoquant "les années de jeunesse" de camus insistait sur l'indissociable sentiment d'angoisse et de désir de vivre ? Ce double visage de Mer / sault - mer / soleil - à l'écoute "des rumeurs d'un monde à jamais différent" !

Étonnant ces petits retours en arrière et encore sont-ils seulement quelques bribes jetées qu'ils faudraient approfondir à sa manière. En tout cas la lecture de camus n'a décidément pas vieilli et relire ces classiques est une heureuse chose que je m'en vais continuer de pratiquer...

Voilà je vous laisse appronfondir...