Grand Hôtel et des palmes d'Anne Deguelle à la galerie Dix9 / by herwannperrin


Tombé par hasard sur cette exposition d'Anne Deguelle à la Galerie Dix9 en allant chez sa compagne, la galerie Les Filles du Calvaire juste à côté. Une nouvelle galerie, enfin récente du moins, trois expositions déjà à son actif sur de la photographie avec Pauses / Wonderpools de Yohann Gozard et Stasi / Secret Rooms de Daniel & Geo Fuchs qui aurait ma préférence a priori.

Donc voilà, je ne savais pas trop de quoi il en retournait et sans lecture du dossier de presse vous ne pouvez que passer à travers le travaild'Anne Deguelle. Une exposition photographique "souvenir / mémoire / quête / ..." sur Raymond Roussel. Alors qui était Raymond Roussel ? là est la question qu'il est intéressant de se poser quand comme moi on ne le connaît pas. Tout d'abord, la lecture du dossier de presse vous apprend que c'était un écrivain, qu'il était fasciné parCamille Flammarion, qu'il fréquentait Marcel Duchamp où le connaissait  et finalement qu'il est allé faire un tour dans la Ville de Palerme en Sicile, c'est en effet là qu'il a fini ses jours dans la nuit du 13 au 14 juillet 1933.

Lorsque que l'on effectue une recherche sur Google sur Raymond Roussel, on apprend qu'il s'agit d'un écrivain complexe a priori :

Dans Locus Solus il indique : "je choisissais deux mots presque semblables. Par exemple billard et pillard. Puis j'y ajoutais des mots pareils mais pris dans deux sens différents, et j'obtenais ainsi deux phrases presque identiques. Les deux phrases trouvées, il s'agissait d'écrire un conte pouvant commencer par la première et finir par la seconde. Amplifiant ensuite le procédé, je cherchais de nouveaux mots se rapportant au mot billard, toujours pour les prendre dans un sens autre que celui qui se présentait tout d'abord, et cela me fournissait chaque fois une création de plus. Le procédé évolua et je fus conduit à prendre une phrase quelconque, dont je tirais des images en la disloquant, un peu comme s'il se fut agi d'en extraire des dessins de rébus"

François Almaleh indique : "Le procédé dans Nouvelles Impressions d'Afrique est quelque peu différent et extrêmement compliqué. Il a fallu 7 ans pour écrire les 40 pages du livre auxquelles se sont adjoints 59 dessins assez mystérieux par rapport au texte, par rapport à leur agencement très particulier dans le livre ! R.Roussel a même imaginé une machine pour lire son livre. La principale difficulté de lecture est l'imbrication de parenthèses à plusieurs niveaux, avec des notes de bas de page (cf extrait ci-après)

Visiblement, rien ne peut être expliqué simplement : les textes et dessins ont fait l'objet de très nombreux commentaires, tant le mystère demeure.

Extrait : ((((Dès que l'homme, au surplus, pour avoir ausculté (((((Comme on fait d'un jeune être à qui la Faculté A défendu l'amour et la fenêtre close En le trouvant miné par la tuberculose, Qui, dure aux jouvenceaux, respecte l'âge mûr))))) Pendant qu'on l'épluchait telle porte ou tel mur (((((Gardons-nous d'oublier qu'en effet la voix porte;))))), Voit tout nus ses défauts, ses tics, ses appétits, Par ses yeux complaisants ils sont rendus petits (((((Tels : -l'ombre, vers midi, sur le cadran solaire, ... "

Ailleurs, on trouve une citation d'André Breton : "Roussel est, comme Lautréamont, le plus grand magnétiseur des temps modernes. Chez lui, l'homme conscient extrêmement laborieux (?) ne cesse d'être aux prises avec l'homme inconscient extrêmement impérieux (?). La magnifique originalité de l'oeuvre de Roussel oppose un démenti lourd de signification et de portée, inflige un affront définitif aux tenants d'un réalisme primaire attardé?"

Benoît Virot nous raconte quelques unes des anecdotes liées à la vie de Raymond Roussel : "Toute la vie de Raymond Roussel, né en 1877, est tissée d'anecdotes rebattues le consacrant comme excentrique : tous ses repas de la journée pris à la suite l'un de l'autre, le refus de porter ses chemises ou ses faux cols plus de trois fois, son don pour les imitations (il travaillait sept ans chacune d'elle), sa roulotte ultra-perfectionnée où le nonce du pape et Mussolini sont venus lui rendre visite, son goût pour les jeux et les pâtisseries (particulièrement la guimauve, la panade et le racahout), son admiration pour Jules Verne (« Demandez moi ma vie, mais ne me demandez pas de vous prêter un Jules Verne ! »), le soin qu'il laissait aux ouvriers de l'Imprimerie Lemerre de remplir au dernier moment les noms de ses personnages, laissés en blanc, ou son monumental caveau de 32 cases au Père Lachaise..."

Et plus succinctement sur Wikipedia avec une mini-biographie...

Aussi, allez savoir quel est le vrai du faux dans cet ensemble complexe... Personnage étrange en tout cas et à découvrir un peu plus avant.

L'exposition est quelque part un peu dans le même tons. En effet, difficile de dire que l'on aime ou pas, ce qui est certain c'est qu'il y a unécho à l'Homme, à son monde et si Anne Deguelle s'est en allé sur ses traces que cela soit dans la ville même, voire jusqu'à son hôtel et dans la chambre de feu R. R.

A découvrir donc mais surtout l'oeuvre de l'écrivain ...

Rendez-vous sur le site Internet d'Anne Deguelle pour en apprendre un peu plus sur elle... et on comprend déjà mieux son travail en lisant cet extrait trouvé sur son site : "Élevée à l'art surréaliste du lapsus, experte en glissements dans sa conversation comme dans son ?uvre, l'artiste aime à jouer des mots comme des signes du réel : « difficile, quand on est obsessionnelle comme moi, de ne pas voir des signes partout », s'amuse-t-elle. Son art consiste ainsi avant tout à arpenter ce « Ministère des coïncidences » » qu'évoquait Marcel Duchamp, un de ses « cobayes » esthétiques préférés.(...)"

 


Galerie Dix9

19, rue des Filles du Calvaire - 75003 Paris
Tel: 01 42 78 91 77