Un pur espion de John Le Carré / by herwannperrin



Magnus Pym a disparu. L'illustre agent des services secrets britanniques, brillant conseiller aux affaires culturelles à Washington, ex-agent en Autriche, en Tchéquie et d'ailleurs demeure introuvable. Sans lettre d'adieu, sans traces, les ficelles du métier d'agent se retrournent contre ceux qui l'ont recruté, formé, soutenu. Seul indice, la mort du père, Rick T. Pym, escroc de seconde zone, à la vie aussi décousue que farfelue, capable de vous soutirer l'argenterie de mamie en vous vendant les mérites de son entreprise de nettoyage. Un père envahissant, omniprésent, ex-vrai-faux-candidat aux municipales, dont Pym tente de se débarasser, dans la vie comme dans la mort? en vain. La trame de fond est posée.

Le lourd ouvrage de John Le Carré (près de 680 pages) sonne à la manière d'un livre testament, puisque c'est Pym Magnus lui-même qui écrit le récit de sa vie (ou de celle de Le Carré?), déposant le fardeau de ses mensonges dans un livre destiné à son fils Tom. Embourbé dans les Services secrets malgré lui, agent double à la solde de l'Est pour cause de dette non réglée, nous suivons chaque détour, chaque rencontre de notre vrai/faux héros, de sa plus tendre enfance, jusqu'à la dernière page du récit. Magnus Pym est un être qui n'a pas vraiment choisi sa vie, mais qui, par respect de l'autorité et d'un besoin d'amour jamais assouvi, assume toujours parfaitement ses missions (peut-être un peu trop d'ailleurs? !).

Chaque personnage du récit compte, nous livre les clés de cet espion certes mystérieux, mais toujours gentlemen : les femmes de sa vie, ses patrons malheureux de la firme, les amis de l'ombre, les gorilles de Downing Street. Sur fond de guerre froide, d'espionnage Est/Ouest, c'est ici la vie d'un agent de l'ombre, qui finalement nous paraît humain, très humain? John Le carré livre ici son livre le plus autobiographique. « Sa vie étalée dans sa tête comme dans une bande dessinée aux couleurs vives », voilà le legs de cet ouvrage d'espionnage, qui mêle profondeur des sentiments, humour décalé, critique de la bourgeoisie anglaise... Entre le testament de Pym et une course contre la montre pour retrouver le Pur espion, c'est aussi un témoignage d'amour, qui pousse un fils fuyant son père à mieux le retrouver. Idéal pour un long week-end pluvieux sous la couette?