Diane Arbus ou le rêve du naufrage de Patrick Roegiers / by herwannperrin


Voilà que je viens de terminer laborieusement la biographie de Diane Arbus (alias Diane Nemerov, née à New York en 1923) par Patrick Roegiers, non pas qu'elle ne soit pas intéressante, au contraire même mais le temps n'est malheureusement pas extensible à loisir... On y apprend plus que Diane elle-même semblerait -il; on y rencontre les photographes qui ont pu la côtoyer pendant cette période intense qui a été celle de construction de son oeuvre.

Oeuvre immense dans laquelle, je désire maintenant me plonger, il semblerait que le livre Révélations soit un bon commencement pour voir quelques oeuvres photographiques de Diane Arbus. En effet, c'est un peu le seul regret de ce livre, il est question de Diane Arbus, de dizaines de grands photographes, de photos évidemment mais sans que jamais il soit possible d'en voir une seule, c'est assez frustrant je dois dire, on a envie de les voir, de les palper, de les reconnaître, de s'en souvenir et cela fait diablement défaut.

Alors voilà, on a la théorie, on a le contre point de vue à Susan Sontag et à sa biographie, on voit le parcours de Diane, élève de Lisette Model; des témoignages de ses filles et puis cette extraordinaire capacité de Diane Arbus à s'extraire et à voir le beau dans son côté négatif, dans cette création en opposition avec tous les schémas classiques. Ce n'est pas du rejet mais de la fascination, pas du voyeurisme au contraire, de la pudeur et de l'extrême respect pour ces hommes et femmes qu'elle va suivre, irradié de lumière, de sa lumière, ce sont des amis devenus qu'elle prend en photographie, elle est proche, elle est vrai et sincère dans ces photographies.

Cette biographie réédité 20 ans après sa première parution, permet de parcourir avec les yeux et la sensibilité de Patrick Roegiers à travers la vie et les oeuvres photographiques de Diane Arbus. Il nous dépeint les monstres qui ont peuplés son existence, l'étrange qui est ici bas et son travail démiurgique en quelque sorte de reconstruction d'un Eden, d'un autre monde négatif de celui actuellement.

Pour elle, il n'y a pas de descente aux enfers, c'est plus une fascination pour ces êtres. Mais il n'y a pas qu'eux, loin de là, il y a la solitude des hommes et des femmes mais aussi le vieillissement et la désagrégation progressive mais inéluctable du corps. Puis également des séries sur les nudistes avec la fonction sociale de certains accessoires; elle a cette capacité à s'immerger dans des mondes complexes et à en tirer la substance. Les déviations sexuelles, entre homosexualité et transsexualisme sont également abordés de plein fouet par Diane Arbus qui va jusqu'à photographier des siamoises enfermées dans leur bocal; on apprend un peu plus sur ce type de  gémellité  complexe, ce pas vers l'androgyne parfait d'avant la chute vers lequel peut être un jour nous tendrons... L'étrange fait irruption dans notre monde et elle le circonscrit et l'analyse à travers son regard, sa vision d'une justesse effroyable et d'une précision inégalée. L'enfer du couple et de la famille est également un de ces sujets d'alors qui n'était pas abordé et pas de cette manière encore aujourd'hui, cette horreur du toucher...

Le plus important reste pour elle la relation qui passe entre le photographe et la personne photographiée.

Bon, je vous conseille de le lire et le relire, c'est un livre à découvrir, approfondir et auquel il faut revenir assurément

Un site non officiel de Diane Arbus