CUZCO

Rallier  Cuzco vous permet de  joindre l'utile à l'agréable, d'égrener une journée de transport ponctuée de petites haltes. 

A Abra de la Raya,  vous êtes à la frontière entre la région de Puno et Cuzco, à près de 4300 mètres , la route est désertique, seulement peuplée de quelques maisons à flan de colline, de montagne. Quittez alors ce point et redescendez vers la vie, vers les arbres  et les cultures, activité principale de la région. Faites un arrête  à Raqchi, au milieu des montagnes rouges sang et découvrez les vestiges du temple de Viracocha. Recueillez-vous dans  la splendeur du XVIIème siècle avec  l'église baroque d'Andahuaylillas, , surnommée la chapelle Sixtine de l'Amérique latine. Perdue au milieu de nulle part, le sublime est au rendez-vous. 

La religion et les incas: Petit retour en arrière sur l'importance de la religion chez les incas : "Comme les pharaons, les Incas, en instaurant dans leur Empire le culte du Soleil, ont donné à leur impérialisme une sanction religieuse et cherché à créer un lien entre eux et les peuples soumis. Ils n'étaient pas hostiles aux religions locales, mais exigeaient que dans chaque province une place privilégiée fût accordée à leur ancêtre, le Soleil".

Également étonnant d'apprendre que "l'or et l'argent n'étaient appréciés qu'en tant que matières pour ornements et objets rituels" il n'existait pas de monnaie...

Cuzco, la ville en forme de Puma, se dresse dans toute sa longueur et sa croissance, ville touristique par excellence où les prix sont légèrement démultipliés. Notre point d'orgue sera SanBlas avec pour les quelques jours sur place deux hôtels très sympas. Le premier est grand luxe, c'est Amaru Hostal et son petit patio fleuri ou vous ne pouvez que vous sentir bien et ensuite c'est l'Hostal San Blas, juste en face ou presque où nous avons pu hériter d'un lit géant avec vue de nuit sur la ville étoilée. Il est à noter : "Quand, premiers hommes de notre race, ils y pénétrèrent en 1533, les temples n'avaient pas encore perdu leur plaque d'or qui, telles des corniches, en décoraient les façades. La ville leur parut si grande qu'ils racontèrent "qu'en huit jours ils ne purent tout voir". Ils furent également frappés par les rues "bien tracées et bien pavées". Quelques mois plus tard, Pizarro et son armée prirent possession de Cuzco…

Au cœur de Cuzco, la célèbre Plaza de armas se dresse, satellite incontournable avec ses églises, ses  balcons. Occasion nous est donné de se promener dans tous les quartiers adjacents. Evitez de vous user les yeux sur les danses folkloriques proposés, les péruviens avaient l’air  d'apprécier mais vu la scénographie, la musique et le rendu acoustique, c'est une expérience à ne pas tenter. Si par le plus grand des hasards vous rencontrez une cantatrice avec pour ainsi dire toute la bourgeoisie locale, fuyez sauf si vous aimez les ambiances de kermesse grésillante de fin d'année Le musée d'art populaire est franchement déplorable qu’on se le dise.

Ceci expliquant peut être cela : les incas étaient préoccupés par les travaux agricoles et pour affiner et connaître le moment des semailles, ils ont du trouver des solutions. Une de celles-ci a consisté en la création peut être par Pachacuti "sur la  crête d'une montagne à l'ouest de Cuzco, quatre petites tours de pierre, visibles d'une plate-forme située au milieu de la grande place de Cuzco. Les deux tours du milieu étaient rapprochées. Lorsque le soleil atteignait la première, ils se préparaient pour les semailles et lorsqu'il se couchait entre les deux piliers du centre, c'était le moment de semer au Cuzco". 

Ah oui, également, un petit aparté sur les sacrifices humains : "Les apologistes de la civilisation inca, dont Garcilaso de la Vega, ont jeté un voile pudique sur les sacrifices humains qui étaient pratiqués de façon courante, soit en les niant, soit en diminuant leur importance. Les incas ne se sont jamais complu aux hécatombes des Aztèques, mais ils n'en immolaient pas moins des victimes humaines à leurs grands dieux et à leur principales huaca"

A Cuzco, la vie de la rue s’offre à vous et  permet de s’affranchir des distances et de découvrir encore et encore des mets locaux. Le quartier de San Blas est un petit bijou   de part la vue qu’il offre sur la cité éveillé et endormie, son enchevêtrement de ruelles tout en en surplomb. L’errance peu commencer à la nuit tombée ou au crépuscule et laissez s’exprimer la ville étoilée de mille feux, lui donnant ainsi un aspect irréel.

Aux  environs de Cuzco,  le site de Saqsaywaman se dresse. Vue imprenable sur la ville vivante et son étendue. Saqsaywaman, ou les vestiges d'une forteresse qui fut en 1536 le théâtre d'une des plus grande bataille d'alors entre Espagnol et Incas, entre Manco Inca et Pizarro. Il ne reste malheureusement que les structures les plus imposantes, le reste ayant été démantelé par les espagnols pour construire leurs demeures dans Cuzco. Il y a toujours ces impressionnants enchevêtrements de roches sans mortier par un ajustement qui semble avoir été fait par des mains non humaines tellement cela semble parfait: "de grandes pierres polygonales étaient utilisées, s'emboîtant parfaitement les unes dans les autres sans laisser le moindre espace vide". Ces structures et cet assemblage permettant notamment de mieux supporter les mouvements de plaques et tremblements de terres fréquents dans la région ce qui n'est évidemment pas le cas des structures espagnoles... A cet égard, on notera "qu'il n'y a pas longtemps encore, les archéologues attribuaient l'appareil polygonal, de type "cyclopéen", à un empire mégalithique bien antérieur à celui des temps dont Tiahuanaco aurait été le centre (...) En fait, la chose est prouvée, les deux appareils, le cyclopéen, comme celui aux assises rectangulaires, sont contemporains et ne remontent pas au-delà du XVème et même du XVI siècle".

D'après ce que peut en dire Alfred Métraux : "la masse impressionnante des édifices construits par les Incas, leur appareil cyclopéen, le tracé audacieux des routes de montagne, les immenses terrasses de culture ont beau nous inspirer la plus vive admiration pour les souverains qui ont ordonné de tels travaux, ils ne nous font pas oublier le labeur des ouvriers employés à leur construction. la plupart des chroniqueurs louent l'esprit de justice qui présidait à la répartition du travail. Il semble en effet que le nombre de paysans astreints à la corvée fut faible par rapport au reste de la population. S'il est exact que la forteresse de Sacsahuaman, l'édifice le plus colossal réalisé par les Incas, ait été bâtie par trente mille hommes, on a calculé que ceux-ci ne représentaient que 1,9% du nombre total des assujettis c'est-à-dire des hommes adultes entre vingt et cinquante ans, si on estime l'Empire à huit millions d'individus, et que 3,8% si l'on accepte que la moitié de ce chiffre"

Ensuite, prenez le temps  de parcourir les sites de Moray et Salinas (Salines de Maras) non loin de Cuzco, deux véritables petits joyaux  perdus dans la campagne que vous pouvez rallier assez simplement Moray, c'est un laboratoire de culture mis en place par les incas dans une cuvette, des berges concentriques qui s'étagent, il y a trois petits laboratoires qui se succèdent de dimensions différentes : "il s'agit de terrasses situées près de Cuzco, disposées en cercles concentriques, le centre du cercle étant le niveau le plus bas des terrasses. Les scientifiques modernes se rendirent compte que chaque niveau avait une température différente. Ceci aurait permit aux Incas d'étudier l'acclimatation des céréales, tubercules et autres plantes servant à leur alimentation. Ils purent faire des croisements et des améliorations de certaines familles." Le site est presque vierge, devant les montagnes au loin, il n'y a pas âme qui vive aux alentours, c'est un grand moment dont il vous faut profiter, il faut dire que les incas ont été à la source de pas mal d'expériences qui leur ont permis de faire émerger par exemple la pomme de terre telle qu'on la connaît aujourd'hui ou encore le maïs, le légume roi de l'époque. Il est intéressant de noter l'étymologie  du mot Moray, "lié au champ de maïs, qui s'appelait Aymoray, ou au mois de mai qui s'appelle aussi Aymoray, mais également à la pomme de terre déshydratée qui est la Moraya ou Moray". 

Pour Salinas, il s'agit d'un site permettant de récolter du sel issu d'une rivière qui passe par là, le site n'est plus si  exploité mais on voit encore quelques personnes s'afférer. La beauté du lieu avec ces couleurs bruns et ocres et les différentes déclinaisons des bassins qui s’offre en contre plongée est un grand moment de bonheur. Pouvoir se promener à ciel ouvert dans cet endroit est quelque peu magique. Au fond d'une vallée perdue, les vents soufflent et relatent cette histoire saline...

De Cuzco, l’appel du Macchu Pichu (la vielle montagne) devient pressant. La jungle sera notre point de départ, la descente jusqu'à environ 1900 mètres par les routes complètement défoncées est digne des plus grands films catastrophes. La question se pose de savoir si l’on peut survivre à un bus local qui fait un premier arrêt pour cause de crevaison (et de resserrement de boulons), enchaîne ensuite  par des passages à presque à 45° ; un simple glissement et l’envolée sera lyrique et unique… la fin est proche. Heureusement l’arrivée est là.

La découverte à vélo  de la beauté des paysages alliée à la luxuriance de la végétation, est on ne peut plus agréable. A la croisée des chemins de terres, se profilent de vagues villages quasiment enfouis dans le débordement de la nature reine, quelques cimetières bordent les routes, il doit faire bon de reposer en terre si belle, une fabrique de thé perdue est là avec ses odeurs et ponctuellement de vielles stations services émergent au milieu de nulle part.

On finit par arriver à destination, un petit village perdu dans la montagne, coincé dans la végétation Santa Theresa, une petite bourgade où l’on va passer la nuit, au bout du monde en quelque sorte, un endroit qui compte presque peut-être plus d'épiceries que d'habitants. Village devant être desservi par le train et se développer mais suite à un tremblement de terre, c’est la déliquescence annoncée qui a pris le pas.  Le temps dans cet endroit a une autre dimension que l’on retrouve dans cette  vieille bouteille de vin qui s’est transformée en Porto.
La nuit se passe, courte car le périple continue dans les ombres de la nuit. A l’aube, c’est la marche forcée qui se met en place, l’acide qui remonte et les muscles qui souffrent mais c’est sans compter avec le bonheur somptueux de découvrir les sources d'eau chaude de Santa Maria, véritable paradis perdu où nous sommes seuls au monde dans les différents bassins mis à disposition. 

La journée peut commencer, le soleil frappe, les traversées de rivières en charriot vont bon train avec pour seule compagne la forêt et sa beauté primitive. Nos pas nous guident vers le fond de la vallée, vers la ville des confins, Aguas calientes, au pied de laquelle a vécu, survit et resplendit maintenant le Macchu Pichu éternel, la cité perdue. Le grand jour est arrivé, la montée vers les cieux, vers la civilisation d’alors et l’aube rayonne sur les cimes, le Machhu Pichu se dévoile, intact presque figé dans le temps, vierge de toutes présences. Pour couronner le tout, l’ascension du Huayna Picchu est un morceau de bravoure qui se mérite mais la satisfaction à la clé est à la hauteur de vos espérances. Au sommet du pic, vous dominez la vallée, les montagnes environnantes et la tête dans les nuages vous respirez et vivez.

Plongez dans l’infinie splendeur du Pérou qui s’offre à vous encore vierge de vos pas